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Qu’est-ce que « l’exit tax », impôt supprimé par Emmanuel Macron que Lucie Castets veut rétablir.

Dernière mise à jour : 22 août



Le réveil d’un impôt controversé

En cette fin d'été 2024, alors que les débats autour du budget national s'intensifient, une proposition inattendue émerge dans l’arène politique française. Lucie Castets, une figure montante du NFP et candidate potentielle au poste de Première ministre, a récemment dévoilé son intention de ressusciter l'exit tax. Ce fameux impôt, effacé des tablettes par Emmanuel Macron en 2018, pourrait bien faire un retour fracassant sous sa forme initiale. Mais qu’est-ce que l’exit tax, et pourquoi son retour divise-t-il tant ?


Aux origines de l’exit tax : Une arme contre l’exil fiscal

L’exit tax est née en 2011 sous la présidence de Nicolas Sarkozy, dans un contexte où la lutte contre l’évasion fiscale devenait une priorité. Inspirée d’une mesure similaire datant de 1998, mais abrogée sous la pression de l’Union européenne en 2004, l’exit tax visait à freiner l’hémorragie des contribuables aisés qui quittaient la France pour échapper à l’impôt. Le principe était simple : si un Français décidait de transférer sa résidence fiscale à l’étranger, il devait s’acquitter d’une taxe de 30 % sur les plus-values théoriques de ses participations dans des sociétés, qu’elles soient françaises ou étrangères. Ce mécanisme, en apparence, avait de quoi dissuader les velléités d’exil des plus fortunés.

Pour être assujetti à cette taxe, le contribuable devait remplir plusieurs conditions strictes. Il fallait notamment avoir résidé en France pendant au moins six des dix années précédant le départ et détenir soit au moins 1 % du capital d’une entreprise, soit un patrimoine mobilier évalué à plus de 1,3 million d’euros. Mais cette initiative ambitieuse, malgré ses intentions louables, s’est rapidement heurtée à des problèmes d’application.


Macron et la réforme de l’exit tax : Une attaque contre une impôt jugé inefficace

Sept ans après son instauration, Emmanuel Macron, fraîchement élu président, décide de s’attaquer à l’exit tax. Estimant que cet impôt n’atteignait pas ses objectifs, il choisit de le remplacer en 2018 par une « taxe anti-abus », une version allégée de l’exit tax. Si cette nouvelle mouture conservait l’idée de base, elle en modifiait fondamentalement l’application en réduisant drastiquement le délai d’exonération. Sous Sarkozy, l’exit tax ne s’appliquait plus si le contribuable attendait plus de huit ans avant de vendre ses parts après son départ à l’étranger. Ce délai avait ensuite été allongé à quinze ans par le gouvernement socialiste en 2014, pour renforcer l’effet dissuasif de la mesure.

Cependant, Macron a réduit ce délai à seulement deux ans, une modification perçue comme un geste envers les entrepreneurs et les investisseurs, souvent hostiles à ce type d’impôts qu’ils considéraient comme un frein à la mobilité et à l’innovation. En simplifiant le système, Macron espérait stimuler l’attractivité de la France et son économie, mais ce changement a rapidement suscité la controverse.


L’efficacité de l’exit tax en question : Un impôt à la rentabilité douteuse

Dès ses débuts, l’efficacité de l’exit tax a fait l’objet de débats houleux. Si l’on se fie aux prévisions initiales, cette taxe devait rapporter environ 200 millions d’euros par an. Pourtant, dès sa première année d’existence, elle n’a généré que 53 millions d’euros. En 2017, le montant n’a guère dépassé les 70 millions d’euros. Un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires publié en janvier 2018 soulignait même un écart flagrant entre les recettes attendues et celles effectivement perçues, révélant que l’impôt aurait dû rapporter 803 millions d’euros pour la seule année 2016. Cet écart s'explique en grande partie par la complexité du suivi fiscal sur une période aussi longue, rendant la tâche de Bercy quasi impossible.

Certains défenseurs de l’exit tax avancent toutefois que son efficacité ne se mesure pas uniquement aux recettes qu’elle génère. Ils estiment que son pouvoir dissuasif, en dépit de ses faibles rendements financiers, a sans doute freiné les départs à l’étranger de contribuables fortunés. Mais cette vision est loin de faire l’unanimité, notamment chez les économistes libéraux qui dénoncent l’inefficacité et l’ineptie de cette taxe.


L’ombre de l’exit tax : Les enjeux d’un rétablissement controversé

Le débat actuel sur le rétablissement de l’exit tax dans sa version initiale prend une ampleur particulière à l’approche des prochaines échéances électorales. Lucie Castets, en prônant un retour au délai de quinze ans pour l’exonération de la taxe, veut se poser en championne de la justice fiscale. Selon les calculs de l’Institut Montaigne, un rétablissement de ce délai pourrait rapporter 67 millions d’euros par an. À première vue, ce chiffre peut paraître dérisoire face aux recettes globales de l’État, qui dépassaient 170 milliards d’euros en 2024. Cependant, pour Castets et ses partisans, la symbolique est forte : il s’agit de montrer que l’État ne tolère pas les tentatives d’évasion fiscale, même au prix d’une complexité administrative accrue.

Mais la proposition de Castets ne fait pas l’unanimité. Les opposants à l’exit tax soulignent que cette mesure pourrait de nouveau inciter les investisseurs à fuir la France, décourager l’entrepreneuriat et finalement nuire à l’attractivité du pays. De plus, la lourdeur administrative et les coûts de gestion associés à un suivi sur quinze ans sont pointés du doigt comme des facteurs de déséquilibre pour l’État.


Un choix politique décisif : Entre justice fiscale et compétitivité économique

En fin de compte, la question de l’exit tax cristallise une opposition fondamentale entre deux visions du rôle de l’État. D’un côté, ceux qui, comme Lucie Castets, estiment que l’État doit avant tout garantir l’équité fiscale, même au prix de contraintes administratives. De l’autre, les partisans d’une France plus ouverte et compétitive, pour qui la simplification fiscale est essentielle pour attirer talents et capitaux.

Le retour de l’exit tax sera-t-il le fer de lance d’une nouvelle ère de rigueur fiscale ou l’ultime affrontement entre justice et pragmatisme économique ? La réponse pourrait bien façonner l’avenir fiscal de la France pour les années à venir. Une chose est certaine : le débat ne fait que commencer, et les prochains mois s’annoncent décisifs pour l’avenir de l’exit tax et pour la place de la France dans le concert des nations économiques.

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